Voici ma critique du film Shin Kamen Rider. Ce film japonais est réalisé par Hideaki Anno et visible en France sur la plateforme Amazon Prime Video sous le nom « Shin Masked Raider » depuis le 23 juillet 2023.
Il est sorti au cinéma au Japon le 18 mars 2023. Je regrette de ne pas pouvoir revoir ce film au cinéma en France, j’espère qu’il sortira quand même !
L’histoire : Hongo Takeshi, cyborg mi-humain mi-sauterelle, combat l’organisation maléfique Shocker une organisation criminelle maléfique, responsable de son enlèvement et de sa mutation en hybride de synthèse. Ruriko Midorikawa, s’est échappé de l’organisation et rencontre Kamen Rider. Quelle voie suivront-ils ? Malgré sa force, Hongo s’accroche à son humanité. La violence cessera-t-elle ?
Ce film est un adaptation de la première série Kamen Rider, diffusée à la télévision japonaise de 1971 à 1973. Mais l’adaptation est tellement libre qu’elle doit à mon sens s’aborder comme une oeuvre indépendante.
https://youtu.be/IHmueApky40
KAMEN RIDER UN PERSONNAGE INCONTOURNALE AU JAPON
Avant de vous dévoiler mon avis sur ce film, je veux introduire Kamen Rider qui est une référence incontournable au Japon en manga comme à la télévision, c’est une légende qui a traversé les génération. Mais assez peu connu en France en comparaison avec une autre légende Godzilla.
Kamen Rider a été créé en 1971 par le mangaka Shotaro Ishinomori qui publie dans le Weekly Shōnen Magazine.
La première adaptation télévisée, nommée Kamen Rider, fut diffusée dès 1971 et 1973 et produite par la société Toei.
Kamen Rider fait partie du genre Tokusatsu (contraction de tokushu satsuei) qui signifie effets spéciaux pour caractérisées ses séries télévisées japonaises riches en effets spéciaux et héros qui enfilent leur costumes moulant pour combattre le mal et nous montrer des cascades et des poses aussi gracieuses qu’impressionnantes. En réalité ce terme fourre-tout englobe aussi bien les films que les séries.
Godzilla et les films de kaiju font aussi partie de ce genre Tokusatsu, mais ce sont les série Ultraman et Super Sentai (plus connu en France sous le nom Power Rangers) qui sont les marqueurs les plus parlant.
Au Japon, s’il y a bien une grande figure tokokastu, que tout le monde connait et reconnait, c’est Kamen Rider.
L’histoire de Hongo Takeshi, un brillant scientifique et pilote de moto, est enlevé par l’organisation secrète Shocker qui tente de le transformer en un cyborg qui possèderait des caractéristiques de sauterelle. Juste avant de se voir effacer la mémoire, Hongo est finalement libéré par le professeur Midorikawa.
Pouvant désormais se transformer en Kamen Rider, Hongo va s’efforcer de lutter contre les monstres envoyés par Shocker dans le cadre de son projet de conquête du monde. Mais Shocker ne s’arrête pas là et essaie de créer un autre Rider à partir du photographe Ichimonji Hayato pour abattre Hongo. Cependant Hongo parvient à sauver Ichimonji et à en faire son successeur le Kamen Rider 2, pendant que lui part contrecarrer les plans de Shocker à l’étranger.
Hongo reviendra par la suite au Japon pour continuer à se battre contre les sbires de Shocker.
Le scénario de ce premier Kamen Rider a été fortement influencé par l’accident de moto subi par Fujioka Hiroshi lors du tournage des épisodes 9 et 10 qui l’a contraint à un repos forcé de plusieurs mois. Le personnage interprété par Sasaki Takeshi a donc été intégré en urgence et est devenu le nouveau héros le temps de presque une quarantaine d’épisodes.
Ce qui a changé depuis les débuts de la série est que les histoires des Kamen Riders sont devenues moins manichéennes, plus penchés sur l’histoire des personnages. La classe de Takeshi Hongo, elle, demeure intemporelle.
Du manga à la télévision, de la télévision au cinéma…
Kamen Rider a engendré des dizaines de productions : de séries télé, de produits dérivés, des jeux vidéos et des films. Il existe aujourd’hui des dizaine de Kamen Riders et certains sites proposent des classements de leur puissance.
Dans les séries, la structure de chaque épisode est la même : le héros se transforme en Kamen Rider avec l’exaltante et célèbre expression « Henshin! » ( qui signifie transformation!) pour lutter contre les monstres.
Du point de vue du design des personnages, le Kamen Rider n°1, celui qui a fixé une fois pour tout l’univers visuel des costumes, était basé sur le concept d’un « humain modifié » se transformant en entomoïde (humanoïde insecte) ressemblant à une sauterelle. Au fil des années, ce concept s’est trouvé décliné sur toutes les formes imaginables.
Un des derniers représentations de Kamen Riders, Gaim en 2013 mixe les apparences d’un samouraï en armure et des attaques spéciales en forme de fruit !
L’univers Kamen Rider signé Ideaki Anno
En film, j’ai vu « Kamen Rider The First », sorti au Japon en 2005 qui revisitait déjà la série de 1971.
Ce qu’il est très important de souligner, c’est que ce genre est d’abord destiné au public et au marché japonais. Une dimension de la culture japonaise qui déborde de créativité et qui ne vise pas à séduire le public occidental. C’est aussi pour cela qu’il existe un décalage qui peut rebuter les attentes d’un public non averti qui ne prendrait pas la peine de s’adapter pour comprendre cet univers. Ce constat est évident et demeure quand on voit ce remake de Anno en 2023.
Ce film est particulier au sein de la franchise, car il est réalisé par Hideaki Anno. Les fans d’anime connaissent ce nom qui est derrière des classiques de l’animation comme Gunbuster, Nadia et le secret de l’eau bleu ou évidemment Neon Genesis Evangelion, une pierre fondatrice de mon histoire avec l’animation japonaise (je vous dévoile pourquoi dans mon livre).
Anno a aussi réalisé pour le cinéma. Je vous bien sur parler de sa récente trilogie Shin, dans laquelle il reprend de grands personnages de l’imaginaire japonais pour les remettre à une nouvelle formule, notamment en les plaçant dans un contexte plus adulte, le terme « shin » voulant dire nouveau. Il y a d’abord Rebuild of Evangelion (4 films), le film Shin Godzilla en 2016, puis Shin Ultraman en 2022 dont Anno n’a que scénarisé. Et enfin Shin Kamen Rider qui vient conclure cette série de quatre films en 2023
ANALYSE DU FILM
Un authentique travail de revisite, parfaitement interprété
Sans détour, j’ai apprécié ce film car il est un savant mélange d’éléments intéressants. Je m’explique. D’abord, il coche la case du respect de l’authenticité de Kamen rider, l’ADN de l’oeuvre d’origine ou devrais je dire de prana qui est sa source d’énergie vitale. Mais en plus, il apporte une bonne dose de créativité et de modernité.
Il est moderne, car l’équipe du film se permet non seulement de rendre l’histoire plus mature, principalement en donnant aux personnages, héros comme méchants, une profondeur psychologique. La réalisation est aussi forcement plus moderne avec l’utilisation des effets spéciaux.
Je m’en doutais, Shin Kamen Rider c’est du pur Hideaki Anno. Il place dès le début du film ses thématiques de prédilection. Le réalisateur axe son propos autour de l’existentialisme et la quête de soi. A travers les deux visages de son personnage principal, Hongo est empathique et bienveillant mais devient un tueur sans pitié dès lors qu’il revêt son masque.
Le rythme du film nous plonge immédiatement dans l’action. Hongo se lance dans sa croisade après avoir battu à contrecœur son premier ennemi mi humain, mi araignée.
Au fur et à mesure de l’histoire, c’est à travers ses choix qu’il va s’affirmer en véritable héros.
Le film se déroule comme une suite de combat, contre l’organisation SHOCKER et ses hybrides mi humains-mi animaux, les AUGS. Il repose sur une structure relativement simple entre scènes d’action et scènes plus posées de discussion entre les personnages.
A chaque nouvel adversaire, l’histoire nous dévoile un peu plus en détail la relation de Ruriko et Hongo. Une mission commune en forme de combat plus personnel : l’antagoniste final du boss est le frère de Ruriko, Ichiro, un papillon-monstre frappé de mégalomanie, il faut le dire 🙂
Sur le respect de l’oeuvre d’origine, je pense que Anno réalise un sans faute. Il reprend l’essence de ce qu’est Kamen Rider. Les méchants et leurs costumes extravagants, le héros et ses poses légendaires, l’armure de Kamen Rider qui ressemble totalement à celle de la série des années 70 et, surtout, la mise en scène avec ses nombreux plans de saut et ses zooms sur le héros. Tout y est.
Cerise sur le gâteau, on retrouve la signature Anno, avec des clins d’oeils visuels à Evangelion mais aussi des apartés existentialistes.
Le point positif est qu’il n’est pas obligatoire d’avoir vu la série ou lu le manga pour comprendre l’histoire de ce film Kamen Rider.
Les relations entre les personnages au centre de l’histoire
Hideaki Anno assume son choix de se baser sur des enjeux intimistes, en prenant le temps de caractériser l’ensemble de ses personnages, et c’est une réussite dans ce film, surtout graçe à la performance des acteurs et actrices confirmés et qui ne nous sont pas étrangers. Je ne connais pas assez la série pour comparer avec les acteur d’origine (d’ailleurs cette comparaison ne serait pas très utile) mais j’ai été surpris par la qualité du jeu des acteurs et actrices. J’imagine la difficulté pour jouer de manière crédible ces personnages.
L’acteur Sōsuke Ikematsu qui incarne Hongo Takeshi (le personnage principal Kamen Rider) est excellent. C’est un acteur que j’avais découvert dans le film « l’infirmière » et que l’on peut voir actuellement dans le film « RENDEZ VOUS A TOKYO ». Il m’a surpris dans un registre différent mais son interprétation est parfaite, autant pour les scènes d’action que pour les scènes plus psychologiques, il incarne parfaitement les nuances et le caractère de son personnage. il faut savoir que l’acteur n’utilise quasiment aucune doublure combat. Il a débuté à s’entrainer six mois avant le début du tournage. Je pense qu’il est prêt pour prendre la relève de Tom cruise dans Mission Impossible.
Ruriko Midorikawa (Minami Hamabe) qui était un personnage secondaire dans le manga et dans la série joue un rôle de premier plan dans Shin Kamen Rider. elle porte les enjeux et montre la voie à Takeshi Hongo. Ce personnage et leur relation sont aussi des réussites.
Enfin, j’ai vraiment apprécié la relation qui se tisse avec Hichimongi, l’autre Kamen rider, qui apparait dans la dernière partie du film. J’y vois une philosophie de vie dans laquelle je me reconnais assez, sur l’amitié et la confiance. Une volonté d’aller toujours de l’avant !
Ce que j’apprécie vraiment dans ce travail de revisite, c’est à quel point tout est sincère et assumé dans le déroulement de l’histoire comme dans la mise en scène. Shin kamen rider réhabilite le premier degré dans les films de super héros. Le fait d’assumer le kitsh de mélanger les type d’effets spéciaux numériques, avec ceux à « l’ancienne » donne un esthétisme singulier, à défaut de donner de la profondeur.
Des combats créatifs et spectaculaires
Il y a un domaine ou j’attendais cette nouvelle version du Kamen raider, c’est celui des combats. Pour moi, c’est une réussite, malgré quelques bémols. Deux mots pour résumer les affrontements, créativité et générosité. Même si je ne suis pas un spécialiste du genre, je pense que Shin Kamen Rider puise dans les fondations du genre pour le sublimer.
Visuellement, le film se situe au carrefour de deux esthétiques. D’une part, Anno reprend la mise en scène appliquée par Minoru Yamada en 1971 avec les zooms et un grain d’image bien spécifique. Et de l’autre, il propose des plans tournés à l’IPhone, notamment pour les visions subjectives des personnages. Et l’ensemble fonctionne très bien. C’est super créatif. Le combat entre les deux Kamen Rider 01 et 02 est chorégraphié à la manière d’un combat Dragon Ball Z, mais en live !
Flirtant sans cesse avec les limites du kitch propre à ce genre, Anno s’affranchit de toute volonté de crédibilité. Les plans se succèdent dans la plus grande décontraction, à tel point que j’ai parfois ressenti un sentiment de désorientation qui peut être frustrant. Mais je pense que ça vaut la peine de le dépasser, si on accepte de se laisse aller dans le délire de la mise en scène, les scènes d’actions deviennent vite exaltante. Cet aspect fake et too much amène aussi le charme rétro du film.
Je pense aussi que si quelqu’un chez Disney décide de regarder les films SHIN ULTRAMAN, Shin GOZ ou Shin Kamen Rider, je pense que cela rapporterait bcp de bonnes idées, d’énergie et de créativité à la franchise Marvel.
Si on rentre un peu plus dans le détail, il existe trois catégories d’effets visuels co-produits par KHARA INC (le studio d’Hideaki Anno) et SHIROGUMI INC.
1)L’ajout d’éléments physiques tels que du sang liquide et la luminescence des yeux de chaque masque.
2) La production de séquences entières en CGI.
3) L’ajout ponctuel numérique tel que les de bulles ou les effets « Prana » (Une source omniprésente d’énergie qui maintient toute vie.
Enfin, impossible de passer à coté de la « Ceinture de métamorphose », véritable symbole des Kamen Riders. La Ceinture de métamorphose est un accessoire essentiel chaque fois que le héros se transforme en Kamen Rider. Tous les jeunes japonais en ont rêvé.
Le casque que l’on reconnait immédiatement et certaines attaques comme le Rider Kick sont aussi les éléments références des Kamen Riders. La moto est un acteur à part entière du film bien utile dans certaines situations, je vous laisse découvrir pourquoi. Dans le film, on voit que tous ces éléments sont plus que de simples accessoires, ils font partis des personnages (un peu comme les armures des chevaliers du Zodiaque).
Quelques défauts apparents
Un défaut de l’histoire pour moi est que chaque nouvel adversaire Insecte aug apparait un peu comme un cheveux sur la soupe, sans grande transition entre eux. Le film manque un peu de liant, le nombre important de personnage n’aide pas. Heureusement, les actes d’ouverture et de clôture du film sont les moment les plus forts et atténuent un peu ce défaut.
Je comprend parfaitement que l’on puisse se laisser décourager par le rythme intermittent du film, les effets de chorégraphies des actions et les effets spéciaux. Certaines scènes d’action flirte avec le grand n’importe quoi. Parfois j’avoue que j’ai eu du mal à suivre. Par exemple la scène avec la horde de sauterelles vers la fin du film, qui se déroule dans un tunnel, entrecoupée d’une course poursuite assez longue, ça fait un peu trop pour moi. A tel point que j’ai fait une pause pour reprendre le film un peu plus tard. Je n’aurai pas pu faire ça au cinéma…
Dans tous les cas et pour toutes ces raisons (points positifs pour moi comme points négatifs), ce film ne peut pas plaire à tout le monde en France. En particulier, celles et ceux qui ne sont pas familiers avec ce genre de films.
J’aimerai savoir comment les jeunes générations appréhendent et apprécient ce film. Dites moi votre avis dans les commentaires ?
CONCLUSION
En conclusion, je dirai que même si j’ai largement préféré Shin godzilla, j’ai apprécié cette expérience Shin Kamen Rider. Car je n’attendais par grand chose. Au début du film, je voulais juste être surpris. A la fin du film, pour moi le contrat est rempli.
Shin Kamen Rider est autant une déclaration d’amour à franchise qui a traversé les générations qu’une relecture intéressante du héros. En fait les qualités du film sont aussi ses défauts.
C’est un long métrage qui balance en permanence entre l’intime et le spectaculaire. Et cet équilibre est fragile. Ce que j’ai vraiment aimé, c’est l’authenticité de la démarche artistique et la créativité de toute l’équipe de film. Et la signature de la part de Hideaki Anno qui se ressent tout au long de l’histoire (qui n’est pas toujours facile à suivre 🙂
C’est aussi pour toutes ces raisons que ce film ne pourra pas plaire à tout le monde.
MA NOTE : 4/5
https://japoncinema.com/les-films-japonais-a-voir-au-cinema-en-2023
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